Issu d’une famille bien implantée dans le milieu des bâtiments ducaux, Emmanuel Héré (1705-1763) se forme au métier d’architecte sur les chantiers voulus par Léopold. Stanislas le distingue en le nommant à son service et c’est ainsi qu’il devient l’ordonnateur des ambitions artistiques du dernier duc de Lorraine.
Bien qu’il ait vu le jour en 1705 à Nancy, le jeune Emmanuel Héré va rapidement lier son destin à Lunéville et aux travaux du château ducal. Comme son père Paul, il exerce des fonctions surtout administratives au sein du service des Bâtiments dans les années 1720. Il croise alors Germain Boffrand, l’architecte de Léopold, à l’occasion de ses derniers séjours en Lorraine. Au cours des années 1730, Emmanuel Héré reste en retrait derrière Jean-Nicolas Jennesson (1686-1755), autre architecte lorrain qui assure l’achèvement de plusieurs projets du pouvoir ducal.
Lorsque Stanislas arrive à Lunéville au début du mois d’avril 1737, il se tourne naturellement vers Jennesson. On attribue par tradition à une « incompatibilité d’humeur » la rupture qui intervient rapidement entre les deux hommes. Jennesson aurait eu quelques difficultés à faire siennes les idées artistiques de Stanislas. Plus accommodant, Emmanuel Héré tire son épingle du jeu et succède à Jennesson comme « premier architecte » du duc de Lorraine en 1738.
Une activité intense règne alors à Lunéville, dans les appartements du château et plus encore dans les jardins. Stanislas souhaite agrémenter parterres et bosquets hérités de Léopold de pavillons conçus pour les divertissements de sa cour. D’inspiration italienne, chinoise et même turque, ces bâtiments plein de fantaisie émerveillent les visiteurs. L’art d’Emmanuel Héré renoue avec les formes classiques lorsque s’ouvrent à Nancy de grands travaux d’urbanisme. En 1752, Stanislas décide de créer un nouvel ensemble de places reliant la Ville Neuve à la Ville Vieille. Il prévoit de faire de la plus importante un hommage à son gendre, le roi de France Louis XV, futur maître de la Lorraine. Les façades de pierre dessinées par Héré s’élèvent autour d’une statue de ce souverain, dont l’écu aux fleurs de lys surmonte les arcs de triomphe de métal doré. Les meilleurs artistes sont ici mobilisés sous la direction du premier architecte, à l’image de Jean Lamour pour la ferronnerie ou Barthélemy Guibal pour la sculpture. Inaugurée en 1755, l’actuelle place Stanislas devait être l’aboutissement de la carrière d’Emmanuel Héré. Atteint par la maladie, il meurt le 2 février 1763, laissant un héritage qui appartient aujourd’hui au patrimoine mondial de l’humanité.